Interview : Clément B. – comédien

J’ai effectivement une paire de gants dans ma gibecière dont je ne me sépare jamais. De gros gants en cuir bien épais. Je peux vous dire qu’ils en ont soulevé de la souche, conduit des tracteurs, désherbé des mauvaises plantes… ou des petits cousins trop encombrants. Ah, ah, ah…

C’est mon père qui me les a offert quand j’ai été en âge de reprendre la gestion du domaine. C’est lui qui m’a tout appris. Ma mère, sa deuxième épouse, la première ayant succombé à un terrible accident de cœur, était une personne assez reposante, bien qu’un peu trop pieuse à mon goût.

Je me souviens également d’une jeune femme très jolie, mais un peu étrange, qui errait dans les couloirs à longueur de journée. Je ne sais pour quelle raison, elle avait tendance à disparaître dès que nous recevions du monde. C’est amusant. La pauvre a fini par perdre la tête.

 

Pour en revenir à ces fameux gants, ils n’ont rien à voir avec ces petits gants en soie qui ont l’air d’être tant à la mode chez les jeunes gens « raffinés ». Chaque année le bal reprend alors que la saison s’éteint : on en voit défiler une paire ou deux aux mains d’un petit cousin qui vient s’enfermer chez nous, allez savoir pourquoi. À part jouer au piquet, il n’y a rien à faire et ils sont trop fragiles pour m’accompagner dans les terres, de véritables moineaux !

Quoi qu’il en soit ils arrivent à distraire tout le monde, ma sœur Agathe a de nouveaux adversaires aux cartes, ma femme Éléonore et son frère Sébastien jouent avec eux comme des chats avec une souris. En revanche, nous sommes obligés d’enfermer ma première fe… hum… Ophélie au grenier, car c’est une jeune femme dérangée… qui a tendance à beaucoup trop parler. Mais au moins on me lâche les basques. Et au mieux, ils finissent à un moment ou à un autre par nourrir les vers, c’est bon pour la terre. Ah, ah, ah…